Textes litteraires

LES PERSONNAGES

De la réalité à la fiction

Textes des étudiants du Choix Goncourt de l’Orient 2025

Ecrits lors de l’atelier d’écriture animé par Salma Kojok

Dans les locaux du Centre d’Employabilité Francophone

De l’Agence Universitaire de la Francophonie/ Moyen Orient

Beyrouth/ Avril 2025

 



 

Liste des auteurs

 

Sara Abawi, Université de Jordanie, Jordanie

Karim Abou Melhem, Université Libanaise, Liban

Huda Adnan Salman, Université Al-Mustansiryah, Irak 

Emad Aljohre, Université de Mutah, Jordanie  

Hala Anouti, Université Libanaise, Liban

Sarah Aoun, Université Libanaise, Liban

Nawal Al Asaly, Université de Taez, Yémen

Rou'a al-Dhahabi, Université Libanaise, Liban

Sarah Awni, Université de Zaitouna, Jordanie

Cynthia Berberi Université Libanaise, Liban

Roudy Darwich, Université Saint Joseph, Liban

Rahma Eisa, Université de Gézira, Soudan

Rémie Farah, Université Libanaise, Liban

Ali Hassan, Université de Mossoul, Irak

Soaad Ibrahim, Université de Khartoum, Soudan

Alya Khalaf, Université de Birzeit, Palestine

Salma Khaled, Université d’Alexandrie, Egypte

Karen Nader, Université Ain Shams, Egypte

Nourhane Samad, Université Libanaise, Liban

Jibril Taleb, Université Libanaise, Liban

Sama Tamimi, Université Al Najah, Palestine

Nour Tarek, Université de Bagdad, Irak

Mona Yazbeck, Université Libanaise, Liban

 

« Rencontre à Beyrouth »

Sara Abawi, Université de Jordanie

 

Hier matin, à Beyrouth, alors que je marchais dans une ruelle tranquille, j’ai croisé un homme dont le regard m’a profondément marqué. Il semblait à la fois triste et mystérieux, comme s’il portait le poids d’un lourd passé. Il portait une chemise bleue froissée et un pantalon noir poussiéreux, dégageant une forte odeur de parfum, qui me rappelait celle d’un homme qui travaillait, peut-être même dans mon ancienne école. Dans ses mains, il tenait des papiers chiffonnés. Cela m’a fait penser qu’il venait peut-être de perdre son travail. Il s’est assis lentement sur les marches d’un escalier, juste devant une vieille porte rouillée. Il regardait dans le vide, comme perdu dans ses pensées. Soudain, son téléphone a sonné. Il a décroché d’une main tremblante. Après quelques secondes de silence, ses larmes ont commencé à couler. Sa voix était brisée quand il a murmuré que le recruteur ne voulait pas de lui. Puis, il a crié, comme s’il voulait que le monde entier l’entende : « Il n’y aura aucune motivation… aucune motivation… c’est fini. La vie est compliquée, injuste et malheureuse. Je mérite ce chagrin. »

 

Je suis resté figé, incapable de bouger. Ce moment m’a fait réfléchir à la fragilité de nos existences et à la solitude silencieuse que beaucoup portent sans jamais la montrer.

***

 

La première fois que je l’ai vue, elle était en colère, seule dans son bureau. Elle parlait à voix haute avec les clients, comme si elle était la seule employée de l’entreprise — ou même sa directrice. Son attitude m’a immédiatement stressée. Je la trouvais agressive, incompréhensible. Je pensais même qu’elle était un peu folle. Franchement, je ne voulais plus travailler dans un endroit comme celui-là. Un jour, j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai essayé de lui parler, juste pour comprendre pourquoi elle était toujours aussi énervée. Elle a refusé de me répondre. À chaque fois que j’en parlais à la directrice, elle me disait simplement : « Laisse tomber, fais ton travail. » Petit à petit, la colère s’est installée comme une routine dans l’entreprise. L’ambiance devenait de plus en plus lourde. Alors, j’ai pris du recul. J’ai commencé à effectuer des recherches sur les raisons qui poussent certaines personnes à se comporter ainsi. J’ai découvert que de nombreuses personnes vivent des situations familiales très difficiles. Ça m’a fait réfléchir. Et j’ai décidé de tenter une dernière fois de lui parler. Cette fois-là, elle s’est mise à pleurer brusquement. Elle m’a avoué, d’une voix tremblante : « Ma mère est gravement malade. Elle a besoin de soins constants… et en plus, je dois m’occuper de mes frères. »

 

Son histoire m’a bouleversée. D’un coup, tout s’est éclairé. J’ai compris que derrière sa colère se cachait une immense douleur. Depuis ce jour-là, j’ai décidé de l’écouter, de la soutenir et de l’aider à retrouver un peu de lumière dans sa vie.

 

 

 

« Dans les replis du silence »

Karim Abou Melhem, Université Libanaise

 

Ce matin, au jardin du cloître, j’ai croisé Jad. Il était assis sur le vieux banc de pierre, celui que nous appelions jadis notre trône d’enfance, et portait un manteau de laine grise, trop grand pour lui, comme si le tissu peinait à dissimuler l’effacement de sa chair. Il a fait un geste avec son parfum. Un effluve discret, boisé, familier, s’est élevé et s’est mêlé aux effluves du chèvrefeuille.

Je me suis approché sans bruit, craignant presque de troubler cette paix suspendue. Le soleil filtrait à travers les feuilles, découpant des éclats d’or sur ses joues pâlies. Jad leva les yeux vers moi. Son regard, encore vif malgré la fatigue, contenait cette lumière intérieure que je n’avais jamais su nommer mais que je reconnaissais entre mille : une clarté qui venait de plus loin que la douleur.

— Assieds-toi, dit-il simplement.

Alors je me suis assis, à sa gauche, comme toujours, là où il m’avait appris à lire le silence des jours. Nous ne parlâmes que peu. Il y a des instants où les mots, pour être fidèles, doivent savoir se taire. Les oiseaux ponctuaient nos silences de leurs trilles discrets, et les cloches de midi, au loin, semblaient pleurer le temps.

— Tu sais, murmura-t-il après un long moment, je n’ai plus peur.

Je ne répondis rien. Ma gorge se serra, mais je me contentai d’acquiescer d’un hochement de tête, presque imperceptible. Jad fixait un point invisible, au-delà du jardin, au-delà même de la journée. Il semblait écouter quelque chose que je n’entendais pas encore.

— Le corps s’éteint, ajouta-t-il, mais il y a autre chose… quelque chose de léger… de vaste.

Je le regardai, bouleversé par tant de douceur dans l’acceptation. L’éclat du parfum qu’il avait effleuré tout à l’heure flottait encore autour de nous, comme une trace infime, dernière offrande de sa présence. Il me prit la main. Son geste était simple. Mais dans cette étreinte discrète, il me transmit tout ce que les mots n’auraient su porter : la gratitude, la paix, et cet invisible passage qui déjà s’amorçait.

— Je serai là, dit-il enfin, dans les replis de ton silence. Tu n’auras qu’à fermer les yeux.

Deux jours plus tard, il s'en allait, dans la quiétude d'une nuit sans étoiles. Je le sentis partir sans douleur, sans bruit, comme il l'avait toujours souhaité : dans le silence, avec cette grande noblesse qui lui était propre. Il était un ange, et c'est dans la douceur de cette pensée que je le laissai s'éteindre, sachant qu’il se fondait dans une paix que rien ne pourrait jamais entamer. Et depuis, je marche, parfois, sans but précis, et il me semble qu’il est là, tout près. Une présence douce, invisible, mais constante. Un frémissement dans les feuillages. Un rayon de lumière qui s’attarde. Une intuition paisible dans l’incertitude.

Jad est devenu, peu à peu, l'ange gardien de mes nuits solitaires, celui qui, même dans l'absence, veille silencieusement sur moi. L'amitié terrestre a cédé la place à un amour céleste, d'une pureté et d'une beauté indicibles.

 

***

La première fois que je l’ai vue.

Ce n’est point une phrase, mais un battement d’aile, un souffle suspendu dans l’éternité d’un instant ; ce fut au cœur d’un matin où le monde semblait retenir son souffle. J’arpentais un jardin, solitaire ; les pierres polies par le temps s’épanouissaient sous la lente poussée des herbes, et la brume, comme un voile de soie, effleurait la terre. Tout autour, tout semblait se suspendre dans une attente secrète.

C’est là, à l’ombre fragile d’un amandier en floraison, que je la vis. Elle portait une robe couleur de perle pâle, qui flottait autour d’elle comme un nuage timide, et ses cheveux — noirs comme les nuits d’été — s’échappaient en mèches souples d’un châle brodé qu’elle tenait d’une main légère. Elle lisait. Un livre ancien, sans doute, à la reliure fatiguée, qu’elle tenait ouvert sur ses genoux, tandis qu’un rayon de soleil, filtrant à travers les branches, dessinait sur son visage un vitrail vivant. Elle ne m’avait pas encore remarqué. Et moi, figé dans cet instant suspendu, je savais — avec cette certitude que rien n’explique — que ma vie, désormais, ne se conjuguerait qu’en sa lumière.

La première fois que je l’ai vue, tout devint silence autour de moi, mais ce silence n’était pas vide : il bruissait de mille espoirs, de mille printemps à venir, il avait le goût d’un avenir qu’on ose enfin croire possible. Le vent lui jouait dans les cheveux, effleurait les pages de son livre comme s’il voulait en déchiffrer les secrets, et son sourire, imperceptible d’abord, puis franc, jaillit lorsqu’elle leva enfin les yeux vers moi. Un sourire non pas d’étonnement, mais de reconnaissance. Comme si elle aussi avait su.

« Vous aimez les vers de Lamartine ? » me demanda-t-elle d’une voix claire, pareille à l’eau d’une source lointaine. Je hochai la tête, incapable de parler, mais le cœur gonflé d’une gratitude indicible. Puis, au détour d’un silence, alors que nos pas s’étaient ralentis, elle me fixa soudainement d’un regard presque interrogatif, comme si elle se demandait s’il était encore possible de tout dire dans l’instant. Ses lèvres s’ouvrirent, timides d’abord, comme si le nom qu’elle allait prononcer portait en lui une part de l’intimité de ce moment. « Je m'appelle Léonie », dit-elle alors, les yeux baissés, un léger sourire toujours présent.

Nous avons marché longtemps ce jour-là, parlant de poésie, de ciel, de destin. Le monde, autour de nous, semblait se métamorphoser à mesure que nos pas dessinaient une promesse sur la poussière dorée du sentier. Les heures s’étiraient comme un rêve éveillé, et chaque mot échangé bâtissait un pont invisible entre deux âmes qui, peut-être, s’étaient cherchées depuis toujours.

Depuis ce matin de mars, il me suffit de fermer les yeux pour retrouver le souffle chaud de cette lumière, le chant discret des cigales, et ce regard brun, grave et doux, qui avait fait naître, en moi, une clarté nouvelle. Une clarté qui n’a jamais faibli.

 

Personnages connus et inconnus

Huda Adnan Salman – Université Al-Mustansiryah

 

       Il est un peu ambigu, parfois il dort, parfois il cherche dans son portable. Tous ses gestes expriment l’angoisse.  

      Hier, dans l’avion, j’ai croisé un jeune homme, il était assis à côté de moi, il était grand, tellement gentil puisqu’il m’a laissée m’assoir à côté de la fenêtre. Par accident nous nous parlons :

Il me dit : - Je travaille dans le domaine médical, mais je suis très intéressé d’apprendre le français…

   Je lui dis : - Superbe, allez soyez courageux…

      Il a fait un geste avec sa tête comme s’il était fatigué, pourtant il a toujours gardé son portable comme quelqu’un qui attend un message, ou bien il pense à son travail.

***

 

     La première fois que je l’ai vu, il semblait assez confiant, fort, élégant. Il avait aussi l’air en colère et également strict.

      Il est professeur de français spécialiste de narratologie, aussi il traduit beaucoup d’ouvrages français. C’est un homme qui a tellement réussi dans sa vie professionnelle. En fait, il a été inspiré dans ses études par Gerard Genette, en même temps il inspire beaucoup d’étudiants.

   Le prof est très confiant en lui-même et il a la raison. Il a vécu une vie dure avec deux guerres, l’une quand il était enfant, l’autre quand il avait 24 ans.

    À travers les romans qu’il aime lire, on peut comprendre sa personnalité, par exemple il a lu les romans de l’absurde et l’existentialisme. Cela reflète son ambiguïté.

 

« Hommage à Prévert depuis Beyrouth »

Emad Aljohre, Université de Motah

 

Il a versé le café dans la tasse – un petit café arabe, fort, parfumé à la cardamome.

Puis il a ajouté un peu de lait

Et une cuillère de sucre.

Il a remué lentement avec une petite cuillère, a bu une gorgée, puis a reposé la tasse sans me parler.

Il a allumé un narguilé posé près de la fenêtre.

Le charbon rougeoyait tandis qu’il tirait calmement sur la pipe, soufflant quelques cercles de fumée dans l’air du salon.

Il a tapé les cendres dans un petit cendrier en cuivre

Sans me parler

Sans me regarder.

Il s’est levé, a mis son tarbouche, puis a enfilé son manteau imperméable. Dehors, il pleuvait comme un vieux jour d’hiver à Beyrouth, cette pluie fine qui rend tout plus silencieux.

Il est sorti sans me parler, sans me regarder.

Et moi, je suis restée là, seule avec le bruit lointain de la pluie et l’odeur du café.

J’ai mis ma tête entre mes mains, et j’ai pleuré.

 

« Le meurtre de Beyrouth »

Hala Anouti, Université libanaise

                                              

      Le 4 août 2020, sous le ciel matinal de Beyrouth, j’ai croisé mon amie d’enfance Jana à Gemmayzé. Elle était resplendissante, comme à son habitude. Après une accolade amicale, mes yeux se sont posés sur l’objet qu’elle portait affectueusement : un appareil photo. Remarquant mon attention pour son précieux bijoux, Jana a étanché ma curiosité et m’a expliquée qu’elle était là pour prendre des photos. Voilà dix jours qu’elle parcourait les quatre coins du Liban pour collecter des souvenirs, car aujourd’hui, c’est le décollage de son avion. Je ne savais pas si c’était une bonne ou une mauvaise nouvelle, tout ce que je savais, c’est que je voulais qu’elle reste, la voir partir m’a fait éprouver un sentiment, jusqu’ici, étranger à moi : la peur. En arrivant au port, la jeune photographe se mit à son travail, quant à moi, je ne pouvais m’empêcher de contempler ses beaux cheveux châtains qui devenaient semblables à l’or au soleil. À cette transformation mythique, je me suis rappelé la belle époque du Liban, les temps fabuleux où Beyrouth était la Suisse de l’Orient, le Paris de l’Orient. J’ignore pourquoi le départ de mon amie me faisait sentir une nostalgie prémonitoire pour notre pays. Ce jour-là, sans que personne n’ait pu le prédire, la Perle de l’Orient perdrait son éclat. Soudain, Jana se retourna vers moi et avec un sourire chaleureux adressé à tous les Libanais, elle me dit : « Hala, je pars pour très longtemps, cinq ans, ou dix, ou quinze, ou plus, j’ignore combien de temps il faudra à nos nombreux frères pour s’unir sous l’ombre du cèdre, mais d’ici-là, j’espère avoir suffisamment de force et de courage pour continuer à aimer notre cher Liban ailleurs. ».

Ce sont les paroles qui ont resonné dans ma tête au moment de l’explosion du port. Aujourd’hui mon amie n’est toujours revenue et avec son départ, l’espoir nous a été retiré. Tout ce qu’il nous reste c’est le parfum macabre des ruines et l’odeur de la putréfaction des cadavres. 

 

***

      La première fois que je l’ai vu, il m’a lancé un regard aussi noir que les ténèbres. Nous étions seuls et l’ambiance se faisait de plus en plus étouffante. Je me suis retournée dans l’espoir de voir l’un de mes proches franchir le seuil de la porte mais personne n’a réalisé mon souhait. A mon grand désarroi, mon cousin s’est dirigé vers moi à la vitesse d’un lion acariâtre. J’ai essayé de l’ignorer mais il m’a attrapée par le bras et m’a craché les injures les plus humiliantes que je connaisse, comme si j’étais la responsable de la mort de son défunt père. J’ai employé tous les moyens pour lui échapper mais son emprise sur mon bras se faisait plus ferme, plus douloureuse. Ce contact à lui seul me faisait froid dans le dos. Le père est peut-être mort mais le fils, lui, continue à s’en prendre à ma famille et en ce moment j’étais son souffre-douleur idéal. Jamais de ma vie je ne me suis attendu à ce que ce premier face à face soit aussi tendu. Dans un moment de révolte, je me suis surprise à le défier du regard mais ce que j’ai lu dans son âme tourmentée et chaotique m’a clouée au sol. Ce jour-là, j’ai compris que l’entente entre nous est impossible car une fois que le cœur est rongé par la haine, l’être humain se métamorphose en bête animée par la soif de vengeance.  

 


« Femmes »

Sarah AOUN Université Libanaise

Ce matin, dans son jardin au soleil, je l’ai croisée. Elle était là, près du rosier, assise au calme avec son matériel : ses ciseaux, ses pelotes, son crochet à la main, et son chat à ses côtés. Elle portait une robe blanche, parsemée de fleurs éparses. Une belle écharpe, un simple collier. Elle me souriait. Elle était là. Était-elle vraiment là, ou bien n’était-ce qu’un souvenir ? De loin, je l’admirais, je n’osais faire un pas, de peur qu’elle ne s’en aille. Là-bas, dans un coin, un miroir doré reflétait son visage. Elle se rappelait ses rêves oubliés, ceux qu’elle n’avait pas osé réaliser. Elle revoyait son enfance, et les rides sur sa peau fatiguée. Et soudain, le temps s’est replié. Dans son regard, je me suis retrouvée. Elle était moi, d’un autre matin. Une femme entre mémoire et destin. Venue du passé ou d’un jour futur, là où le temps se confond avec l’usure.

***

Texte inspiré du roman de Sandrine Colette, “Madeleine avant l'aube”

Elle ne parlait pas, elle errait dans l’incertitude mais une flamme immortelle la guidait. Elle brillait, elle vibrait, tout le monde le remarquait. Personne ne pouvait la contrôler. Ni échec, ni jugement ne pouvait l'arrêter. Changer le monde était sont idée, le rendre meilleur à jamais. Il lui fallait commencer par désapprendre les normes et les croyances imposées, dans un monde où la famine et l’injustice régnaient. C’était elle la lueur d'espoir qui allait révolutionner la vie. Une note de musique, un vers ou un refrain. Un bus, un train ou un voyage. Comment faire ? Elle n’en savait rien. Elle le ferait pour le blé, pour le pain.

 

« L’ombre d’un homme »

Nawal Al Asaly, Université de Taez

 

Ce matin-là, dans les ruelles paisibles de mon quartier, j’ai rencontré une silhouette familière… L’ombre d’un homme. Non pas n’importe qui. L’ombre d’un être que j’ai jadis connu et aimé profondément, qui a tout représenté dans ma vie. Il est parti un jour, sans un mot. Seul le silence est demeuré. Un départ brutal, sans explication. Aujourd’hui, il m’a saluée d’un simple geste de la main, comme pour dire « bonjour », comme s’il suggérait un recommencement. Il m’a souri calmement, comme si rien ne s’était jamais interposé entre nous. Et ce parfum… ce parfum distinct, qui flottait autour de lui, m’a soudainement ramenée à un passé que je croyais enfoui. Mais la vérité, c’est que ce qui me fait pleurer, ce n’est ni le chagrin qui ronge mon cœur, ni la douleur qui m’accompagne au fil du temps… Je pleure parce qu’au fond de moi, je sais que je ne méritais pas tout ce qui m’est arrivé. Je pleure parce que j’ai tant sacrifié, tant aimé, tant espéré… et pourtant, le mal ne m’a pas épargnée. Je pleure parce que tout ce que je souhaitais, c’était une vie simple et douce, à l’image de mon cœur. Une vie juste, qui m’offrirait une petite récompense pour tout ce que j’ai donné sans rien attendre en retour. Finalement, nous n’étions qu’une leçon l’un pour l’autre. Il m’a appris à ne plus faire confiance. Et moi, je lui ai appris que les beaux sentiments, lorsqu’ils s’évanouissent… ne reviennent jamais.

***

 

 

Un sourire familier.

La première fois que je l’ai vue, le temps sembla se figer. Devant moi, une silhouette familière, presque irréelle. Mon cœur manqua un battement. Elle ressemblait tant à Yasmine, mon amie intime disparue… C’était comme voir un fantôme bienveillant surgir du passé. Ses yeux… d’un vert olive profond, exactement comme ceux de Yasmine, me regardaient avec une douceur troublante. Ses cheveux bruns et bouclés retombaient sur ses épaules avec cette même légèreté familière. Elle portait le style que Yasmine aimait tant : un pantalon à pattes d’éléphant, simple mais chargé de personnalité. Même sa voix, lorsqu’elle parlait, avait cette tendresse calme, cette mélodie que je croyais perdue à jamais. Chaque détail en elle murmurait le nom de Yasmine. Mes yeux s’embuèrent de larmes. Sans réfléchir, guidée par une émotion douce et douloureuse à la fois, je m’approchai d’elle. Nos regards se croisèrent. — Bonjour, lui dis-je doucement. — Bonjour, répondit-elle avec un léger sourire. — Tu ressembles à quelqu’un que j’ai beaucoup aimé… Elle me regarda, un peu surprise, puis son sourire s’élargit, plein de délicatesse, sans poser de questions. Et cela me suffit. Il y avait quelque chose d’étrange au cœur de ce moment… Comme si j’avais traversé par hasard une autre vie. Je ne savais pas si j’étais heureuse de retrouver les traits de Yasmine dans cette jeune femme, ou triste, car Yasmine ne reviendrait jamais. D’une voix douce, elle me dit : — On dirait que tu me connais… Je souris et soupirai doucement : — Peut-être que je ne te connais pas, toi… mais je reconnais quelque chose en toi. Quelque chose qui ressemble à un morceau de mon cœur. Elle m’observa avec attention, comme si elle pressentait que ce lien allait bien au-delà de la ressemblance. — Était-elle très proche de toi ? — Plus que proche… Elle était la sœur que mon âme avait choisie. Un silence doux nous enveloppa. Il n’y avait plus besoin de mots. Parfois, la ressemblance n’est pas un hasard… Parfois, la vie nous envoie des échos de ceux qu’on a perdus, pour nous rappeler que nous ne sommes pas tout à fait seuls. Elle me proposa de nous asseoir un instant. Nous parlâmes de choses simples : de livres, de café, des lieux que nous aimions. Et plus elle parlait, plus je découvrais en elle quelque chose d’unique, différent de Yasmine… mais qui m’apportait malgré tout un apaisement ancien, comme si mon cœur se souvenait soudain de la paix. Au moment de nous dire au revoir, elle me confia : — Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai senti que tu étais proche… Je souris et répondis : — Peut-être que les âmes se reconnaissent, même quand elles ne se sont jamais rencontrées. Puis elle s’éloigna. Je ne sais pas si je la reverrai un jour. Mais ce moment, ce tout petit instant, restera avec moi… Comme un cadeau de Yasmine, revenu sous une forme étrange, avec un sourire familier.

 


« Là où les âmes se reconnaissent »

Rou'a al-Dhahabi, Université Libanaise

 

Il y a trois jours, lors de ma visite chez ma tante pour la fête, j’ai croisé son fils, que je ne connaissais même pas, tant notre famille est grande. J’ai appris qu’il s’appelait Mohamed.

 

Il était silencieux, presque absent, comme s’il appartenait à un monde parallèle. Il portait une chemise simple, mais il la portait comme on porte un secret — avec pudeur et élégance. 

 

Il a fait un geste avec une grâce involontaire, en portant le poignet de sa sœur unique à son visage, et il a senti son parfum. Ce n'était pas un parfum ordinaire. Son parfum, c’était l’odeur des livres, celle que je reconnaîtrais entre des centaines d'autres, une senteur de papier ancien, de mots cachés, de récits en sommeil. 

 

Ce qui m’a troublée davantage, c’est son sourire : discret, mais toujours présent, comme un refuge tranquille au milieu du vacarme du monde. Il était de ceux qui gardent leur sourire même quand tout vacille, comme s’il portait en lui une paix que peu peuvent comprendre. 

 

La première fois que je l’ai vu, il m’a capturée sans le vouloir. Pas par ses mots, mais par ce silence habité, par ce regard qui semblait lire les pages les plus secrètes de mon âme. 

 

Nous étions pareils, seul et seule, deux âmes cachées dans la foule, reliées par une mélodie muette, un souffle, une reconnaissance invisible. Des étrangers aux autres, mais peut-être, familiers l’un à l’autre. 

 

Faits de soupirs, de pensées trop lourdes pour être dites, de rêves qu’on replie entre les lignes d’un carnet oublié, de silences qui crient plus fort que les mots, de regards qui cherchent un abri dans l’âme de l’autre, de fragments d’histoires jamais racontées, mais devinées.

Comme si nos solitudes s’étaient reconnues avant même que nos voix ne se croisent.

Et peut-être que dans un autre livre de la vie, il lira enfin le chapitre où je n’ai jamais osé écrire son nom.

  

“C’était moi, le poison”

Sarah Awni, Université de Zaitouna

 

La première fois que je l’ai vu, il était heureux.

Il aimait la vie. Il riait facilement, comme si rien ne pouvait l’atteindre.

Il portait un pantalon blanc et une chemise bleue.

Il semblait marcher dans la lumière.

Moi, je l’ai vu et je l’ai aimé.

Il brillait sans le savoir.

Aujourd’hui, il ne brille plus.

Il s’habille en noir. Noir comme son regard. Noir comme son cœur abîmé.

Il est triste.

Il ne parle plus de demain.

Il déteste la vie. Il veut mourir.

Un jour, il m’a dit : « Tu es ma vie. »

Je n’ai pas su quoi répondre.

Il m’a donné son bonheur, sans condition, comme un cadeau trop précieux. Et moi, je l’ai perdu.

Je l’ai laissé tomber, comme on lâche quelque chose de fragile sans le vouloir. J’ai écrasé mon amour sans comprendre que je le détruisais.

Ce n’était pas intentionnel.

 

« Larmes étouffées »

Cynthia Berberi, Université Libanaise

 

Ce bon matin, j’ai croisé grand-mère. Elle s’était levée tôt, se dirigea vers le salon et s’installa sur son fauteuil. Elle était triste et mélancolique. Elle portait sa jupe bleue avec un pull noir et une paire de chaussettes vineuses en laine assortie à la couleur de ses cheveux. Elle a fait un geste avec sa main, il semblait qu’elle essuyait des larmes coulées sur ses joues pales et ridées.

Son parfum de quatre-vingt-cinq ans, embaumait sa place, celui de la sagesse, d’une âme souffrante et épuisée qui me rappelle toujours la valeur de cette vieille qui s’est bien montrée après de longues années de batailles internes et spirituelles.

***

 

Des yeux et du regard

 La première fois que je l’ai vu, tout semblait suspendu dans le temps. Seuls ses yeux profonds et silencieux m’observaient comme s’ils cherchaient à déchiffrer chaque petite nuance de mon âme. Le bruit autour de nous s’atténua peu à peu et le monde se réduisit où nos regards étrangers se croisèrent. Sa présence sauvage me traversa comme une forte vague qui emporte tout sur son passage sans prévenir. Il ne parlait point mais il n’en n’avait pas besoin. Ses yeux étaient remplis de secrets qu’il ne voulait pas partager ; une tempête à laquelle je ne pouvais échapper mais que je n’avais aucune envie de fuir.

« Une rencontre »

Roudy Darwich, Université Saint Joseph

Hier soir, au supermarché, j’ai regardé attentivement la caissière. Elle semblait épuisée et pleine à craquer de l’absurdité qui l’entoure. A quoi bon se réveiller chaque matin, travailler de 9h et 18h pour un chèque à la fin du mois ? On n’a même pas le temps d’en profiter. On sentait en la voyant une sorte d’indifférence remarquable, qui épie discrètement l’objet de son regard.

Son parfum, synonyme de douleur humaine, envahissait mes narines, ma capacité à sentir le monde.

Femme de faim

 La première fois que je l’ai vue, elle se tenait bien droite devant l’autel du temple. Elle semblait plongée dans une sorte de transe spirituelle transitoire, les yeux levés vers le haut — vers la croix du Christ. Sa beauté se mêlait à celle qu’elle aspirait à atteindre. On croyait voir une déesse dissimulée humblement derrière le corps d’une mortelle.

Deux minutes plus tard, sans aucun signe prémonitoire, une brume mystérieuse pénétra dans le temple. Chaque chaise, chaque molécule, chaque atome semblait submergé par la densité grisâtre du brouillard. J’ai essayé de regarder autour de moi, mais j’apercevais à peine mes propres membres. On ne comprenait pas comment une brume d’une telle horreur avait pu envahir ce lieu sacré. Soudain, j’ai discerné un visage — ou plutôt les traits d’une bête sauvage. Était-ce humain ? Bestial ? Peu importe. Ce monstre semblait vouloir anéantir toute vie humaine. Les hommes à mes côtés ont tenté de l’attraper, de la capturer, de l’emprisonner. Mais elle était une femme de faim, une femme sauvage.

« Voyage avec l’inconnu »

Rahma EISA, Université de Gézira

 

Dans l’avion, j’ai rencontré une femme que je ne connaissais pas.

C’était une femme libanaise, plus âgée que moi.

Nous avons parlé de plusieurs sujets, puis elle m’a aidée pendant le vol.

Quand nous sommes arrivées à l’aéroport, nous nous sommes perdues en cherchant le taxi.

Nous avons cherché longtemps sans le trouver, mais finalement nous avons retrouvé le chauffeur.

Il était en colère parce que nous étions en retard et que cela avait retardé le trajet.

 

***

Une belle surprise

Avant de rencontrer Madame Salma, je pensais qu’elle était une personne stricte. J’avais très peur et j’étais stressée. Mais dès notre première rencontre, j’ai découvert une femme douce, gentille et compréhensive, bien loin de l’image que je m’étais faite. Sa bienveillance m’a rassurée et m’a permis de me sentir en confiance. C’est pourquoi je souhaite lui dire, du fond du cœur : "Je vous aime beaucoup, Madame Salma."

 

 

Un voyage de peur vers la sécurité

Ce matin à l'hôtel, quand je suis allé prendre le petit-déjeuner, j'ai perdu mon collègue. J'ai ressenti une grande peur, car je ne connaissais personne d'autre que lui. Je me suis senti seul et inquiet.

Heureusement, j'ai rencontré le chef du restaurant. Il était très gentil et souriait toujours. Il m'a aidé avec plaisir et m'a indiqué du geste la direction où se trouvait mon groupe. Ensuite, il m'a accompagnée et m'a aidée à trouver une table.

Après cela, j'ai pu prendre mon petit-déjeuner en toute tranquillité. Il est resté attentif et m'a aidée jusqu'à ce que je retrouve mon collègue.

 

 

 


« Sous l’éclat d’un regard »

Rémie Farah, Université Libanaise

 

Ce matin, au marché, j’ai croisé un étranger,

Un étranger comme on croise un rêve éveillé,

Qui fait vaciller l’air autour de nous,

Qui suspend l’instant dans une frêle fragilité.

Par accident, nos épaules se sont effleurées,

Comme si le monde s’était soudainement figé,

Un frôlement effervescent, porteur de tout le mystère du temps.

Je fis tomber quelque chose, un simple objet,

Mais tout à coup, il devint un tremblement de l’univers.

Il m’a aidée à le ramasser,

Et dans ce geste, j’ai vu une douceur infinie,

Comme si ses mains avaient appris l’art de l’apaisement.

 

Il était grand, l’air tranquille,

L’air d’un homme qui a traversé des horizons que le commun ne peut atteindre,

Un être venu d’un autre monde,

Porteur d’une sérénité lourde de secrets.

Ses yeux, d’un bleu profond, presque irréel,

Étaient des océans dans lesquels je me serais noyée,

Sans résistance, sans retour.

Ses mains, d’une délicatesse inouïe,

Étaient comme des instruments de douceur,

Prêtes à caresser les peines invisibles,

À apaiser les blessures silencieuses.

 

Il portait une simplicité qui lui était propre,

Une élégance discrète mais remplie d’une présence douce et marquante,

Et je me suis égarée dans la douceur de ses traits,

Comme un papillon attiré par la lueur d’une flamme.

Il n’y avait rien de précipité en lui,

Tout semblait se dérouler dans une lenteur sacrée,

Comme si le temps l’avait oublié,

suspendu à son regard, à son parfum.

 

Il a fait un geste avec ses doigts,

Une légère touche, un effleurement à peine perceptible,

Mais qui frissonna dans l’air comme une promesse muette,

Un effleurement que j’ai ressenti jusque dans les tréfonds de mon être,

Comme un murmure entendu au plus secret de la peau.

Son parfum, stupéfiant, me submergea,

Une vague de sensations et de souvenirs impossibles,

Il m'enveloppa, m’écrasa,

Et je me suis laissé emporter,

Comme une âme perdue dans l’éclat d’un rêve d’un autre temps.

Je n’ai rien dit.

J’ai juste respiré,

Comme si l’air lui-même avait changé de nature,

Comme si tout autour de moi avait cessé d’exister

Et que je me fondais dans l’instant,

Dans l’éternité d’un souffle partagé.

Je n’ai rien dit.

Juste un souffle qui se perd dans le silence d’un monde

Qui, pour un instant, a cessé de tourner.

Et ce moment, suspendu,

Était chargé de mille mots non prononcés,

De mille battements d’âme non partagés,

De toutes les vérités que les corps savent,

Avant que la bouche n'ose les murmurer.

 

Quand elle se tait

La première fois que je l’ai vue, elle portait la tristesse

Comme on porte une robe tissée de nuit,

Une étoffe invisible, lourde de silences et de souvenirs effacés.

Ses yeux, deux mers d’encre où se noyaient des rêves fanés,

Fixaient l’horizon d’un monde éteint,

Un monde sans contours, sans couleurs,

Comme si la vie elle-même avait oublié d’exister autour d’elle.

 

Sur ses épaules glissait le poids muet des silences,

Tel un manteau d’hiver trop ancien, trop chargé d’absences.

Ses cheveux, en bataille, dessinaient autour de son visage

Des filaments d’ombre,

Comme si chaque mèche portait un fragment de sa peine.

 

Et pourtant…

Dans le lent mouvement de ses mains,

Dans ses soupirs suspendus entre souffle et oubli,

Je pressentais une force secrète,

Un éclat fragile tapi derrière les voiles sombres de la mélancolie.

Elle était comme une fleur abandonnée dans le vent,

Courbée mais debout, vivante malgré l’absence de lumière.

 

Elle ne disait mot.

Mais son silence résonnait comme une mer en furie,

Racontant mille tempêtes, mille naufrages intimes.

Ses yeux parlaient une langue que seuls les cœurs brisés comprennent,

Une langue faite de battements étouffés et de souvenirs à peine effleurés.

 

Je suis restée là, immobile, à la regarder.

La beauté de sa souffrance me pénétrait doucement, comme une pluie fine qui traverse la peau et s’installe au creux de l’âme.

J’avais l’impression que si je m’approchais trop, elle disparaîtrait, emportée par sa propre brume.

Et pourtant, je ne pouvais détacher mon regard.

Elle avait en elle quelque chose de sacré, comme une prière oubliée que le vent ramène à nos lèvres.

 

Elle était cette lumière éteinte que l’on continue de chercher, longtemps après la tombée de la nuit.

Un éclat d’âme échappé du monde, flottant entre le chagrin et l’espoir.

 

« Ma fleur »

Ali Hassan, Université de Mossoul

 

Elle était belle comme une fleur, avec la grâce et la vivacité qui lui étaient naturelles. Elle était douce, en train de dormir comme un ange. Quand je l’ai embrassée, elle a commencé à rire. Les hôpitaux, sont des lieux bizarres : peut-être les meilleures places au monde pour certains, et les pires pour d’autres.

Je n’ai jamais ressenti un si grand amour pour quelqu’un, même pas pour ma mère ou ma femme. Avoir la chance d’écrire une autre version de moi, c’est quelque chose d’énorme

 

« Fascination »

Soaad Ibrahim, Université de Khartoum

La première fois que je l'ai vue, j'ai été impressionnée par le fait qu'elle soit humaine — une femme de 50 ans, avec un sourire fatigué et des mains marquées par le travail acharné. Avant de la rencontrer, je l’imaginais comme un ange, selon les histoires de mon père. Elle est la seule, parmi ses frères et sœurs, à ne pas avoir reçu d’éducation. Étant la fille aînée, elle a décidé de rester à la maison après la mort de leur mère, pour s’occuper de la cuisine et de ses petites sœurs. Et aujourd’hui, c’est elle la seule qui reste dans la maison familiale, dans ce petit village lointain et cruel. Elle s’occupe de sa sœur atteinte de maladie mentale, tandis que les autres sont tous partis à la ville, pour le travail ou le mariage. J’ai l’impression qu’elle a été sacrifiée pour les autres, mais elle n’a jamais été amère. Au contraire, elle a toujours aimé ses frères et sœurs (surtout ses frères), ainsi que leurs enfants. J’étais complètement fasciné par elle. Pendant l’été, du matin jusqu’au soir, elle travaillait sans relâche pour les autres, sans rien faire pour elle-même. Je voulais la comprendre. Comment une personne peut-elle être aussi altruiste ?

Je l’observais pendant mon séjour, cherchant une trace de faiblesse humaine en elle, mais je n’ai rien trouvé. Quand je la regardais, je voyais bien qu’elle n’avait pas d’ailes. Elle n’est pas un ange. Elle est une femme, avec des besoins et des désirs. Elle doit en avoir. Je le vois quand elle parle seule en travaillant à la maison. Je le vois : elle est perdue dans ses pensées.

Ma fascination s’est vite transformée en malaise. Je ne la comprenais pas. L’observer ne suffisait plus. Je voulais être elle, voir son cœur, et toucher son âme.

« Epreuve »

Alya Khalaf, Université de Birzeit

 

La première fois que je l’ai vu, il était très nerveux, seul dans la rue, son livre à la main, proche de tomber. La panique l’envahissait.

Que s’était-il passé ? Je ne le savais pas. Mais ce que je savais, c’est qu’il s’effondrerait.

J’ai couru vers lui rapidement quand j’ai remarqué que des larmes traçaient un sillon sur sa joue, avant de découvrir qu’il était mon collègue, et qu’il avait échoué au cours d’écriture que nous suivions ensemble.

Pendant que je l’aidais à se calmer, j’ai compris qu’il ne se souciait pas de son échec en soi. Ce qui l’angoissait profondément, c’était la réaction de sa pauvre mère, qui travaille dur pour lui assurer un avenir.

Parfois, on croit que les épreuves rendent plus forts. Mais la vérité, c’est qu’elles brisent aussi.

Tout le monde ne devient pas un héros face à la douleur. Certains deviennent silencieux, d'autres se perdent en eux-mêmes. Les plus sensibles s’éteignent lentement, comme une flamme sans oxygène. Et ce garçon-là… il ne voulait pas vaincre le monde, il voulait juste ne pas décevoir celle qui l’aime.

 

« Somniloquies »

Salma Khaled, Université d’Alexandrie


La première fois que je l’ai vu, je rêvais. C’était mon premier admirateur. Etant paralysée, les hommes ne m’accordaient aucun intérêt. C’était alors le premier à redonner vie à mes sentiments engourdis. Mes somniloquies lors du rêve, que ma mère avait écoutées, lui révèle mes désirs les plus cachés. C’est pour cela que, le jour suivant, ma mère m’a proposé de rencontrer mon éventuel futur marié et j’ai accepté avec avidité.

C’était l’heure des préparatifs, et en me coiffant, j’ai pensé que contrairement aux autres filles qui consultaient leur miroir chaque week-end pour se parer, c’était ma précieuse première fois que j’ai tant chérie.

Me voilà donc dans le salon toute maquillée, toute prête à l’accueillir, avec mes courts cheveux rêches ramassés en chignon, portant une robe rouge serrée sur ma taille gonflée, à l’image de la poupée russe qui était posée sur la table devant moi en train de me fixer. Mais, en l’attendant, mon esprit ne pouvait s’empêcher de demander si l’homme de mes rêves serait l’homme anticipé. La cloche a sonné et je l’ai attendu impatiemment, mais avec toute ma foi, j’espérais qu’il l’ignorait : mon boulet, ma honte, mon tourment, mon fauteuil ambulant…

 

« Le chauffeur »

Karen Nader, Université Ain Shams

 

Hier soir, à l’arrivée à l’aéroport de Beyrouth, le chauffeur Hussein était bizarre. Il portait une veste très large et des lunettes. Il me rappelait l’acteur Georges Khabbaz dans la première scène que j’avais vue de lui. Il a fait un geste avec la feuille où mon nom était écrit. Il semblait ravi de m’emmener et d’être le premier Libanais à me présenter le Liban à travers ses yeux. Son parfum n’était pas le plus important pour moi, ce qui m’intéressait plutôt, c’étaient ses opinions et ses réflexions.

***

La première fois que je l’ai vu, il était hésitant, ne sachant pas comment s’exprimer. C’était bizarre.

C’était la première fois que j’étais en position de gérer un tel problème. Il jouait avec ses mots, essayant de donner des exemples pour éclaircir son point de vue, mais en vain.

Je n’ai pas compris un mot. Il était vraiment doux et gentil, mais une douleur inexplicable brillait dans ses yeux, son esprit semblait être ailleurs, et ses gestes ressemblaient à ceux d’un paralysé essayant de bouger.

Quand la situation est devenue totalement absurde, je lui ai demandé agressivement « il nous reste combien de temps ? »

Il m’a répondu, en étouffant : « Pas trop ! »

 

« L’Aïd el-Fitr »

Nourhane Samad, Université libanaise

 

À l'occasion de l'Aïd el-Fitr, chez ma grand-mère, j’ai croisé Ahmad, un homme que je voyais pour la première fois. Il m'a immédiatement frappée par son allure distinguée, tant par sa posture élégante que par la sobriété de son discours. Il portait un uniforme impeccablement repassé. À son départ, il m'a accordé une étreinte chaleureuse, comme s'il s'agissait d'un être cher. Son parfum exquis rappelait une fragrance que j'apprécie énormément et évoquait une senteur que j'affectionne particulièrement. Bien que fugace, cette rencontre a laissé une empreinte indélébile dans ma mémoire, un souvenir empreint de charme. Ce souvenir, tel un éclat de lumière, persiste, illuminant mes pensées. La douceur de son étreinte, la subtilité de son parfum, tout évoque une présence à la fois réelle et presque irréelle. Je me surprends encore à revivre cet instant. Ahmad, cet inconnu, a laissé une empreinte durable qui continue d'habiter mon esprit.

 

***

 

La première fois que je l’ai vue, elle était en plein désastre. Son état de m’a déstabilisée. J’avais tant entendu qu’elle incarnait une source d’inspiration pour son entourage. Toujours, quoi qu’il advienne, elle ne manifestait que son allégresse et son immense et scintillant sourire qui se dessinait sur ses lèvres. Elle prodiguait des conseils et des coups de main illimités aux opprimés. Mais, cette fois-ci, sa vie basculait à l’envers. Elle avait perdu le secret de l’optimiste perpétuel à jamais. Si bien que, et fortuitement, elle a reçu un acte de divorce de son conjoint. Les jours qui suivirent furent sombres.

Son sourire, autrefois si éclatant, s’était effacé et remplacé par un regard vide et triste. L’allégresse qu’elle dégageait, cette force qui avait inspiré tant de personnes, s'était éteinte. À cause de la douleur du divorce, elle semblait imperturbable et elle se replia sur elle-même.

 

 

« Rencontre »

Jibril Taleb, Université Libanaise

 

Récemment, dans une ruelle calme, par une nuit pluvieuse où l’air était froid, sifflait entre les murs humides et faisait claquer les feuilles mortes, une brume enveloppait l’espace. En passant sous les préaux, j’ai croisé une personne dont l’apparence m’était familière, comme si je l’avais déjà rencontrée bien que je ne parvienne pas à me souvenir où. En réalité, c’est un homme d’un âge avancé dont les rides témoignent des nombreuses années vécues. Il était dans un état où la misère se révélait à travers multiples signes visibles. Son visage était marqué par la fatigue et la pauvreté, sa peau était pâle, ses rides profondes creusaient son front et ses joues. Ses jeux étaient cernés et son regard semblaient souvent perdu dans le vide comme s’il contemplait des souvenirs passés. Son corps tout aussi abîmé, était maigre. Les vêtements qu’il portait étaient usés, déchirés et trop larges. Avec un effort visible, il tentait de lever une main mais ses gestes étaient lents, tremblants, presque incapables. Chaque mouvement semblait lui coûter une douleur intense. Ses lèvres s’entrouvrirent comme pour dire quelque chose mais aucun son n’en sortit. Il essaya encore un dernier effort pour attirer mon attention, pour se faire reconnaître mais la force l’abandonnait peu à peu. Son corps semblait lutter contre la vie elle-même et son visage exprimait une agonie silencieuse. En m’approchant de lui, alors qu’il s’éteignait, un parfum familier m’envahit. C’était l’odeur du quotidien, un mélange de cigarettes usées et de poussière, qui me rappelait les jours difficiles, où chaque geste était une lutte. Ce parfum n’était pas agréable, mais il avait quelque chose de vrai, comme si la vie de lutte et de travail avait laissé sa marque sur lui. C’était le parfum de tous ceux qui, dans la pauvreté et la marginalité, vivent dans l’ombre, sans que personne ne remarque leur lutte. Mais ce parfum, maintenant suspendu dans l’air, restait comme un dernier souvenir de sa présence, un signe de sa vie, celui de tous ceux qui se battent silencieusement, sans jamais être vus.

 

***

La première fois qu’Alfred l’a vue, après un voyage qui avait duré près de la moitié de son âge, il eut l’impression de renaître à travers cette première apparence marquée par une beauté exceptionnelle et des traits uniques qui n’appartenaient qu’à elle. Dès cet instant, elle lui insuffla une énergie nouvelle, comme si plus aucun souci ne pesait sur ses épaules loin d’elle. Autrement dit, lorsqu’il se retrouvait entre ses bras, près d’elle, tout semblait s’effacer. Il oubliait le reste du monde. Elle représentait pour lui une source d’inspiration et d’apaisement. Son parfum venu de la mer et qui enveloppait toute la région lui faisait ressentir une véritable renaissance et éveillait en lui une douce nostalgie. C’était Tripoli, la cité splendide où la culture, l’art, l’architecture, les monuments et la diversité religieuse s’entrelacent pour offrir au monde l’éclat d’un diamant rare, patiemment sculpté par le temps. Capitale du Nord, elle est ce lieu où les appels à la prière se mêlent au son des cloches où les ruelles anciennes croisent les façades des maisons ottomanes chargées d’histoire. Tripoli, n’est pas simplement une ville, c’est une mémoire vivante qui bat au rythme de son passé et son charme réside dans sa simplicité. L’hospitalité de ses habitants est magnifique et dans ces détails qui préservent le parfum de l’histoire malgré l’agitation du présent.

 

« Avant de partir »

Sama Tamimi, Université Al Najah.

 

 

Hier matin, jai dit au revoir à ma maman. Cest une scène que je connais bien, répétée plusieurs fois dans ma vie à cause de mes études à l’étranger. Et pourtant, chaque fois, cest comme si c’était la première. Les émotions ne faiblissent jamais.

Maman était presque sortie du sommeil, encore en pyjama, ses cheveux bouclés légèrement en désordre. Elle ma serrée dans ses bras avec son immense cœur. Son étreinte, cest comme un refuge que rien ne remplace. Et son parfum… toujours le même, doux et rassurant. Il ne change pas. Comme elle. Elle reste ce point fixe dans mon univers en mouvement.

Ce matin-là, je suis partie, mais quelque chose de moi est resté dans cette étreinte. On ne dit jamais adieu à une personne comme elle. On lemporte partout, en silence, dans les battements du cœur.

 

 

LAccident

La première fois que je lai vue, elle venait darriver ici, dans ce lieu oublié du monde, ce coin effacé des cartes et de la mémoire. Rien ne lannonçait, rien ne la précédait. Elle est apparue, simplement, comme portée par un souffle ancien, un élan venu de lintérieur, un sentiment mystérieux quelle ne comprenait pas elle-même. Ce n’était pas un hasard, non. C’était un appel. Un appel silencieux, venu du fond du cœur.

Elle regardait autour delle comme quelquun qui revient chez soi sans en avoir conscience. Ses yeux brillaient dune reconnaissance étrange, comme si elle avait déjà vu ces arbres, senti cette lumière, entendu le chant de ce vent. Elle ne connaissait pas lendroit, mais quelque chose en elle le reconnaissait. Peut-être dans une autre vie. Peut-être dans une autre existence, oubliée mais jamais effacée.

Elle sest arrêtée. Elle ma regardé. Et dans ce regard, jai vu le reflet dun monde que je ne comprenais pas encore. Une sensation étrange ma traversé, douce et familière. Comme si moi aussi, j’étais déjà venu ici. Comme si mon cœur avait gardé la mémoire de cette rencontre avant même quelle nait lieu.

Depuis ce jour, je repense souvent à cet instant. À cette coïncidence si parfaite quelle ne pouvait pas en être une. On passe notre vie entière à chercher des réponses, à avancer, à vieillir. Mais au fond, on cherche peut-être seulement à retrouver ce sentiment de la première fois. Cette vibration profonde du cœur, ce frisson du destin, ce moment suspendu où tout semble avoir un sens, même si on ne sait pas pourquoi.

Peut-être que la vraie magie de la vie ne réside pas dans ce que lon comprend, mais dans ce que lon ressent sans pouvoir lexpliquer.

 

« Le chauffeur »

Nour Tarek, Université de Bagdad

 

Hier matin, à l’aéroport, j’ai croisé le chauffeur du taxi de l’AUF. Dès le début, il m’a semblé… disons, particulier. Très poli, très souriant, mais surtout très perdu. Il m’a regardée avec assurance pour ensuite rater la sortie de l’aéroport — un classique !

 

Il m’assure qu’il connaît parfaitement la route de l’hôtel. Dix minutes plus tard, nous étions... dans un quartier complètement différent. Il consulte son téléphone, demande à un passant, puis repart dans l’autre sens. J’ai failli lui proposer d’utiliser Google Maps, mais je me suis dit : laissons-le vivre son aventure.

 

Il portait une chemise grise soigneusement repassée et un pantalon noir un peu trop court, comme s’il avait grandi depuis la dernière fois qu’il l’avait mis. Il finit par nous déposer devant l’hôtel — miracle ! Puis, sans qu’on ne lui demande rien, il prend mes valises et entre directement à la réception comme s’il allait aussi y passer la nuit.

 

Gentil ? Oui. Bizarre ? Encore plus.

Mais la vraie question reste en suspens : comment une personne libanaise peut-elle se perdre au Liban ? Mystère national.

 

L’amour coup de foudre

La première fois que je l'ai vue, elle était assise seule, plongée dans ses pensées, ses souvenirs et sa mémoire. Elle était différente des autres. Elle avait un regard calme. Elle parlait de manière très douce. Je ne la connaissais pas encore mais quelque chose attirait mon attention. Ce jour-là, sans le savoir, elle a marqué le début d'une belle histoire. Ah, mon cœur, je l'ai aimée instantanément, comme si une flèche invisible avait transpercé mon âme. Son image s'est gravée dans mon esprit, une mélodie douce résonnant sans cesse dans mon cœur.

 

« Un regard d’amour »

Mona Yazbeck, Université Libanaise

 

Ce matin, au parc, j'ai croisé Félix. Il est grand de taille, blond et bien habillé pour un homme qui vient jouer avec sa fille. Il porte une chemise blanche et un pantalon noir. Le type d'homme qui travaille dans un bureau. À la vue de sa femme, assise sur un banc au loin, il esquisse un sourire passant nonchalamment une main dans ses cheveux. Ses yeux verts brillent de mille éclats comme si les étoiles sont venues s'y installées. Son regard d'amoureux en dit long sur lui. Un regard qui révèle silencieusement l'amour de cette famille parce qu'une chose est sûre : Les yeux ne mentent pas.

Le bruit du silence

La première fois que je l'ai vu, il était assis par terre, les yeux rivés au sol. Physiquement, il était présent. Mentalement, il était engouffré dans l'abîme de ses pensées. Aucun signe de vie, aucun mouvement de sa part sauf celui de sa respiration qui me confirmait qu'il était toujours et encore en vie. Dois-je dire heureusement ou malheureusement ?

Les larmes sur ses joues disaient haut et fort ce que ses lèvres refusaient de prononcer. Elles étaient le bruit d’un silence obscur et mystérieux. Une preuve d'une souffrance inexplicable. Cet homme est tombé dans un puits profond. Il crie mais personne ne l'entend. Il attend patiemment de voir une main tendue pour le tirer de ses ténèbres. On dit que l'enfer fait peur mais apparemment, il y est déjà.




« Nous sommes nos histoires » – Jacaranda de Gaël Faye : une expérience littéraire active à l’Université Libanaise


Gaël Faye
est un auteur, compositeur et slameur franco-rwandais, né en 1982 au Burundi. Il s’est fait connaître du grand public avec son premier roman, Petit pays (2016), largement salué par la critique et adapté au cinéma. Son œuvre, profondément marquée par l’exil, la guerre et la mémoire, s’inspire de son vécu personnel entre l’Afrique des Grands Lacs et la France.

En 2024, il publie Jacaranda, un roman puissant sur le génocide des Tutsis au Rwanda, à travers l’histoire d’un jeune homme en quête de vérité sur son passé familial. Le livre a reçu le Prix Renaudot 2024 et le Prix Goncourt des Lycéens du Moyen-Orient 2025

"Nous sommes nos histoires. Celles que l’on dit, celles que l’on tait." Ces mots, issus de Jacaranda de Gaël Faye, lauréat du Prix Renaudot 2024, ont trouvé un écho particulier au cœur de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de l’Université Libanaise. Pendant cinq mois, un groupe d’étudiantes en littérature et médiation culturelle a vécu une aventure unique, autour du Prix Goncourt 2025, mais pas de la manière traditionnelle.

Sous l’œil attentif de la professeure Faten Kobrosli, cette expérience ne s’est pas limitée à la simple lecture d’un livre. C’était un véritable voyage : des lectures passionnées, des ateliers d’écriture créatifs, des jeux de rôle ludiques, des débats parfois houleux et des moments de réflexion collective. Chaque étape était pensée pour que la littérature ne soit pas juste lue, mais vécue, ressentie et partagée.

Tout au long de ce projet, un film documentaire (À découvrir dans la vidéo ci-dessous) a capturé l’essence de cette aventure pédagogique. Il montre les discussions intenses, les questions qui surgissent, les doutes qui émergent, mais aussi les moments de complicité qui se tissent autour des livres. Il raconte l’évolution des étudiantes, leur transformation personnelle au fil des pages, mais aussi leur façon de s’ouvrir aux autres et de découvrir des perspectives nouvelles.

Ce n'était pas simplement une lecture. C'était une immersion dans des sujets profonds et parfois délicats, une occasion d’affronter des déclenché des défis intellectuels, de se confronter à des idées qui remettent en question, et surtout, une manière de prendre confiance en soi. Comme l’a partagé une participante : « On a appris à se faire entendre, à écouter les autres, à lire autrement, à argumenter et débattre et surtout à réfléchir d’une manière qu’on n’avait jamais imaginée avant. »

La fierté des étudiantes a été immense lorsque Jacaranda de Gaël Faye, leur livre préféré, a remporté le Prix Goncourt du Moyen-Orient. Ce moment n’était pas seulement un succès littéraire, mais une victoire partagée, née de cette lecture collective et de leur engagement.

"Nous sommes nos histoires. Encore faut-il oser les raconter." À travers cette expérience, les étudiantes de l’Université Libanaise ont commencé à raconter la leur, en mots, en images, mais aussi dans les discussions et les débats qui ont fait grandir leur compréhension du monde et d’elles-mêmes.